La TVA circulaire
Il s’agit de corriger le prix final des biens et services par une modulation significative de la TVA afin de prendre en compte les externalités[1] environnementales[2] et sociales consécutives générées tout au long du cycle de vie desdits biens et services.
Force est de constater que les prix ne reflètent pas aujourd’hui les vrais coûts écologiques et sociaux. Les activités économiques génèrent des externalités environnementales non comprises dans le montant des transactions, ce qui constitue un obstacle majeur à la transition écologique de l’économie.
L’introduction d’un taux réduit de TVA (TVA circulaire[3]) sur les produits et les services apportant la preuve qu’ils génèrent moins d’externalités négatives permettrait d’améliorer globalement la situation sans toutefois augmenter ni les prix de vente ni l’ensemble des coûts[4] à la charge du consommateur et des citoyens.
On pourrait appliquer cette différentiation de TVA :
– A des offres particulières ayant démontré leur faible niveau d’externalités par rapport aux offres standards du marché
– Ou bien à des secteurs de produits ou services entiers correspondant aux meilleures pratiques qui apportent globalement un niveau d’externalités faibles (ou positif) par rapport à l’unité moyenne de services rendus pour la société (niveau d’utilité, de santé, de bien être, etc.).
Cette solution présente simultanément trois avantages :
– Ne pas reporter systématiquement le surcoût d’une offre responsable sur le consommateur. Celui-ci paierait in fine quasiment le même prix (voire moins);
– Permettre à une offre responsable d’échapper à la concurrence déloyale des « prix prédateurs » des offres peu responsables,
– Diminuer les dépenses publiques[5], ouvrant ainsi la voie à une diminution de la pression fiscale sur ces transactions, tout en permettant aux institutions publiques de conserver la maîtrise des règles du processus.
Cette TVA circulaire permettrait donc de satisfaire l’ensemble des parties : producteurs, consommateurs et pouvoirs publics. Objectif : redonner du pouvoir d’achat sur les marchés de consommation responsables tout en diminuant les dépenses publiques.
Un PROOF OF CONCEPT (POC) de ce dispositif va être prochainement lancé à l’automne 2016 à partir des méthodes que Fondation 2019 a développé depuis 2012.
Cette expérimentation « à blanc » avec un petit nombre d’acteurs, porterait sur deux secteurs distincts :
– Production-consommation de produits manufacturés de grande utilité. (Impact de l’économie circulaire)
– Production-consommation de produits issus de l’agriculture (Impact des modes de production alternatifs, Bio)
Consécutivement à cette première Phase de POC, une deuxième Phase d’Etude d’Impacts pourra démarrer (Impacts budgétaires et fiscaux, Juridiques, etc) en 2017, puis enfin une troisième Phase d’Expérimentation en Vraie Grandeur en 2018 …
Par Romain FERRARI, Président de la Fondation 2019
[1] Une externalité apparaît lorsque l’activité d’un agent économique (production ou consommation d’un bien ou d’un service) a un effet direct (positif ou négatif) sur le bien-être d’un autre agent, sans qu’il y ait pour autant de compensations financières entre eux. On parle de nuisance pour une externalité négative, et de gain pour une externalité positive. En effet, lorsqu’un acteur économique, de par son activité, engendre un effet externe non intentionnel sur un autre acteur en lui procurant un avantage sans contrepartie monétaire, l’externalité est positive. A l’inverse un dommage non intentionnel sans compensation est une externalité négative.
[2] Une externalité est toujours au bénéficie ou au préjudice d’un tiers.
Par extension, l’environnement dans sa globalité, en dernier ressort, peut être assimilé à un tiers.
Ce sont par exemple les dommages environnementaux qui ne sont pas supportés financièrement par la chaîne de production et de distribution. Lorsque ce coût est pris en charge par le responsable direct de l’occurrence de l’impact il est internalisé. La part non internalisée du coût environnemental correspond au coût externe.
[3] Le terme « circulaire » désigne ici l’action de réintroduction ou internalisation des coûts cachés qui échappent habituellement au processus transactionnel.
[4] Au-delà du prix d’achat, ces coûts incluent les frais induits (consommation d’énergie, d’accessoires, d’entretiens) généralement consentis et les coûts cachés non consentis. On relève en général deux grandes catégories de coûts cachés : directs et indirects. Dans le cas par exemple d’une pollution de l’air (induite par le processus de production-consommation), les coûts cachés directs seront liés aux coûts de soins et de nuisances psychologiques, olfactives, esthétiques (coûts de déplacement, prix hédoniques). Les coûts cachés indirects seront associés à la dégradation du bâti, des écosystèmes, des pertes de rendement de l’agriculture, et les effets induits sur le bien-être en général. Certains de ces coûts directs et indirects sont tangibles : couts de consultation et d’hospitalisation, absentéisme. D’autres « intangibles » (ou non-marchand) : souffrance physique et mentale, perte de bien-être et d’aménité, valeur d‘un décès, pertes de biodiversité … Les méthodes qui permettent de modéliser ces coûts sont très robustes concernant les coûts directs et indirects, moins robustes sur les coûts intangibles. Toutefois, malgré les critiques courantes, il faut noter que les approches méthodologiques ont énormément progressé ces 20 dernières années. Une partie des coûts cachés directs tangibles sont pris en charge par la collectivité et financés par les régimes sociaux et la fiscalité. Ceux qui ne sont pas pris en charge creusent les déficits et les dettes environnementales et sociales…
[5] La diminution des dépenses publiques est la conséquence de la réduction des couts cachés pris en charge par la collectivité. Exemples : le coût annuel de la dépollution de l’eau par certaines activités agricoles, le coût sanitaire de la pollution de l’air.
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