Les 7 leçons cachées de l’ère Covid, qui marquent le futur immédiat de la bio spécialisée (4/6)
Quatrième partie : voici la suite spéciale ére Covid-19 des warnings projectifs (évolutions à surveiller en prospective courte) sur les conséquences méconnues du virus pour la bio spécialisée. Au menu, crise de beauté en cosmétique et hygiène.
6/ (Suite) L’offre produits, non alimentaires
COSMÉTIQUE ET HYGIÈNE
Hors gels hydroalcooliques et savon, le marché de l’hygiène beauté est malmené par le confinement et le port du masque. Comme en alimentaire, la naturalité et le bio sont privilégiés. Boostés par la GMS (qui facilite leur démocratisation) ils sont perçus dans l’inconscient collectif comme sûr et non agressif dans un monde moins sécurisant. Les savons artisanaux surgras saponifiés à froid aux huiles végétales plus doux sont ainsi valorisés.
Utilisées classiquement en hiver, les crèmes hydratantes s’utilisent quotidiennement pour les mains, suite à l’agression cutanée des gels sanitaires. Leur usage va certainement durer un moment après le retour à la normale. Nous rentrons en effet dans une époque où, comme en Asie, le virus va rester une menace potentielle.
/ Nouveau maquillage et cheveux vegan : hormis les yeux (mascara…) et les ongles, le marché du maquillage est en berne, le masque dictant sa loi. L’usage désormais intensif des visio-réunions au travail va cependant rééquilibrer le besoin de se maquiller… en attendant l’adoption du maquillage virtuel, qui vient d’être lancé par L’Oréal (Logiciel Signature Face).
Quant aux cheveux, la fermeture des salons de coiffure a boosté, semble-t-il durablement la coloration maison. Une évolution intéressante est le succès des colorations naturelles vegan avec des couleurs originales (surtout en pays anglophone), comme si le fait de restreindre l’exposition des zones cutanées avec le masque et la distanciation sociale exacerbait les parties autorisées (cheveux, ongles, mains…) pour mieux défendre son identité face au Covid.
/ Crèmes solaires anti-lumière artificielle : autre évolution à surveiller de près, les crèmes solaires. Si celles-ci pâtissent aussi du virus pour cause de déplacement et vacances limitées, elles n’en reviennent pas moins sous forme d’un usage désormais quotidien chargé, entre autres, de nous défendre de la lumière bleue de l’ordinateur, des arguments qui attirent les nouvelles générations Y et Z.
/ Monsieur post-Covid : le naturel s’invite subtilement sous forme – confinement oblige – d’une certaine désaffection pour le rasage (surtout pour les rasoirs jetables au profit des électriques), avec un intérêt multiple et durable pour la barbe (shampoings à barbe…), les tondeuses et les soins cosmétiques du visage plébiscités par les générations Z [-24 ans]. Ces évolutions générales [coloration, crèmes protectrices, soins hommes…] plutôt courantes dans les pays anglophones et sur Internet et concernant les produits naturels, « clean beauté » ou bio, sont encore peu référencées en magasins bio.
/ De la beauté physique à la Beauté Monde : au-delà de l’affirmation physique de sa personnalité, plusieurs nouvelles tendances émergentes élargissent la notion classique de beauté. Pour commencer, les marques étendent de plus en plus leur territoire beauté-hygiène à l’hygiène bucco-dentaires, aux mamans, aux ados, au sport et même à l’animalerie, pour une tendance multi-métiers.
Ensuite, les soins de la peau débordent désormais clairement sur l’univers de la santé avec le courant « In & Out » en pleine ascension [compléments alimentaires nutracosmétiques] et porté par de nouvelles galéniques : infusions et tisanes, poudres, gummies, smoothie, boissons, bone broth [bouillon riche en collagène naturel…]. Si le but est d’entretenir sa peau de l’intérieur, les marques naturelles et bio nouvelle génération n’hésitent pas pour cela à s’immiscer dans la digestion, le confort articulaire, le sommeil, etc. En clair la notion de beauté s’étend de plus en plus au désir d’un bien-être physique général augmenté [courant Wellness], brouillant encore un peu plus les frontières entre les univers de consommations.
La tendance Wellbeing va quant à elle encore plus loin avec sa quête d’un désir diffus de bonheur et de mieux-être pour un corps et esprit en parfaite harmonie. Ce nouveau discours, boosté par les inquiétudes liées au Covid19, et difficiles à maîtriser pour les marques bio historiques est largement porté par les jeunes marques et entendu des nouvelles générations [-35 ans]. Celui-ci s’exprime par exemple avec la montée des produits et rituels de confort pour le bain, qui transforment sa baignoire en sanctuaire anti-période agitée. Les automassages minimalistes anti-techno d’inspiration orientale, comme le « face gym » le yoga du visage avec petits accessoires dédiés [face tool] apportent une détente profonde et du sang neuf au classique massage de la peau.
Enfin, un courant holistique émergent prometteur perçoit la nature comme un être vivant, la « Mère » originelle protectrice. Les plantes sont cultivées selon le principe de la biodynamie. De nouveaux rituels beauté fondés sur le respect des cycles lunaires et solaires établissent un désir sincère de connexion aux forces subtiles de la nature et incitent à la découverte d’une féminité « Sacrée ». Comme exemples inspirés en tout ou partie de ces principes, citons les Douces Angevines, marque bio pionnière du genre, ou les nouvelles venues Aymé, Narcissea…
/ De la semence à la peau, le « skin farming » : de manière plus pragmatique, les nouvelles générations vont au-delà du décryptage de la liste INCI en s’intéressant de plus en plus à l’origine agricole des actifs végétaux. Dans un monde de plus en plus incertain, le besoin de connaître l’origine exacte va s’intensifier, en allant, pour les années 2020 jusqu’à la variété de semence utilisée. L’émergence rapide des marques-fermes [récoltant fabricant et formulateur] va aussi élargir le degré d’expertise et les missions mêmes d’une marque cosmétique du XXI° siècle.
/ Vente en ligne, nouvelle concurrence : celle-ci est passée de 10 % de croissance) à 19 % en un an, avec 300 % de croissance aux États-Unis. Constituées d’un écosystème dynamique complet, les e-boutiques ont beaucoup contribué à « sauver les meubles » des marques conventionnelles et bio, ainsi que des petites boutiques spécialisées de beauté naturelle (une centaine en France) qui ont eu la prescience de s’être doté d’une vente en ligne. Une fois le virus disparu, la vente de cosmétiques bio (en baisse dans les magasins bio depuis quelques années) va dépendre pour beaucoup de l’attractivité que va devoir lui donner le circuit bio pour donner envie d’acheter en magasin et se distinguer des autres circuits de distribution.
/ Beauté digitale, mon coach de beauté est une app : au-delà de la vente en ligne, la culture digitale, accélérée par le confinement, s’impose chaque jour un peu plus avec une grande richesse de services : vérifier la liste des ingrédients, prendre soin de sa peau, tester du maquillage ou une nouvelle couleur de cheveux, confectionner soi-même ses produits, ou encore tenir un journal de routines de soin … La beauté s’invite aussi à domicile avec des professionnels locaux qualifiés grâce aux prises de rendez-vous par Internet : maquillage, coiffure, manucure, épilation et même massage.
Les trois tendances 2021 à adopter sont cependant les chats privés en direct (chat live) pour des conseils d’achat, les rendez virtuels gratuits ou payants avec un coach pour des conseils personnalisés, et les Live beauté (vidéos en direct publiques avec chats [livestreaming] qui vont de plus en plus seconder les classiques vidéos en lignes. Ces nouvelles habitudes vont rester après le confinement.
Fin de la quatrième partie — Tribune de veille libre par Sauveur Fernandez, l’Econovateur, accompagnateur marketing innovation — fsauveur@econovateur.com
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