Nouvelle réglementation bio européenne d’ici 2021: ce qui va changer
Trois ans après le lancement des consultations, les pays membres de l’Union européenne sont parvenus le 20 novembre dernier à un accord sur le nouveau cahier des charges bio applicable à l’ensemble des États membres, mais aussi à tout pays qui souhaite importer du bio sur le marché européen.
S’adapter aux progrès du marché de la bio
Les nouvelles règles édictées par les instances européennes veulent être davantage en phase avec la réalité d’un secteur qui a capté de nombreuses parts de marché.
Avec un marché de 27 milliards d’euros, de 125% supérieur à ce qu’il était il y a encore dix ans, l’agriculture bio pourra ainsi continuer de croître en en étant assurée d’avoir « des règles claires et équitables pour tous ». Selon la Commission européenne, « elles allaient finir par entraver la croissance du secteur », assez spectaculaire (+10 % par an en termes de surface) compte tenu des contraintes liées à ce mode de production. L’objectif est bien que « le consommateur puisse avoir une plus grande confiance dans le secteur biologique« , a également insisté le négociateur en chef du Parlement, Martin Haüsling (Verts/ALE).
Les points majeurs du nouveau règlement bio européen
Le nouveau règlement bio européen entrera en vigueur en 2021 afin de laisser le temps à tous de se mettre à niveau.
Une agriculture plus bio et plus accessible
Les nouvelles règles garantissent un système de contrôle physique plus strict et annualisé sur tous les segments de la chaîne d’approvisionnement mais elles offrent la possibilité d’espacer ces contrôles jusqu’à au plus 24 mois pour des opérateurs ayant démontré leur bonne application de la réglementation pendant trois années consécutives.
Le nouveau règlement bio européen confirme également que les cultures hors-sol, telle l’hydroponie, ne peuvent plus porter le label bio européen. L’alimentation des plants devra obligatoirement via le sol et l’usage des serres par conséquent proscrit. Les pays où l’usage des serres a déjà été autorisé pourront cependant continuer à les utiliser pendant un maximum de dix ans.
Afin d’éviter la contamination des terrains réservés à l’agriculture bio par des pesticides, des mesures de précaution doivent continuer à être prises si ces terrains se situent à proximité immédiate de champs où l’agriculture conventionnelle est pratiquée. Les modalités exactes de protection sont cependant laissées à l’appréciation de chaque pays membre.
D’autres mesures doivent également faciliter le travail des producteurs, comme la certification de groupe, une mesure censée réduire les coûts de la démarche de certification et ainsi rendre la pratique de l’agriculture bio plus accessible, ou la mise en place de bases de données nationales, pour garantir 100% de semences bio d’ici 2035.
Des règles strictes à l’importation
La nouvelle réglementation confirme les règles d’équivalence avec les pays tiers qui pourront exporter vers l’UE dès lors que leur réglementation nationale aura été reconnue équivalente.
Il faut savoir que de nombreux pays situés hors de l’Union européenne possèdent à ce jour des accords selon lesquels leurs certifications bio nationales sont équivalentes à celles en vigueur en UE. Les cahiers des charges en pays tiers sont alignés avec les principes de la bio et il n’y a pas d’inégalité majeure. Il peut y avoir des différences qui correspondent à des contextes de production locaux qui ne sont pas identiques au contexte européen.. Certains pesticides non autorisés en Europe sont par exemple utilisés par certains pays exportateurs sur des produits bio et arrivent ensuite en Europe avec le label Bio.
Une réaffirmation des valeurs fondamentales de la production bio
La nouvelle réglementation prévoit d’élargir son champ d’application à de nouveaux produits comme les huiles essentielles ou la cire d’abeille dans le but d’offrit aux consommateurs une gamme plus élargie de produits bio certifiés.
En parallèle, un étiquetage plus clair et fiable sera mis en place. Il informera le consommateur sur l’origine des matières premières agricoles et l’identification de l’organisme de contrôle. Le logo européen figurera en bonne place sur les produits.
Enfin le nouveau règlement facilite l’accès pour les producteurs biologiques aux semences et animaux répondant à leurs besoins spécifiques avec la possibilité de commercialisation du matériel biologique hétérogène et une expérimentation pour les variétés biologiques.
Contraintes bio et liberté des états membres
Comme attendu, pour contraignante qu’elle soit, la réglementation communautaire navigue entre harmonisation européenne et libre appréciation des états membres. Le sujet de la contamination des terrains bio par des parcelles conventionnelles voisines est emblématique. Si les mesures de précaution deviennent nécessaires, leurs modalités doivent être définies par les pays membres.
De même, aucun seuil de tolérance concernant la présence de produits indésirables dans les denrées bio n’a été fixé. Chaque état peut en décider, sans en faire un motif de restriction pour l’accueil de produits importés. Chacun reste également libre de mettre en place ou non une base de données adaptée à l’approvisionnement en animaux biologiques. Jusqu’en 2035 ou même au-delà, les dérogations pour l’utilisation de semences d’animaux conventionnels seront donc maintenues.
La position de la France
Si les organisations professionnelles de la Bio ont reconnu un certain nombre d’avancées (interdiction des nanos, évolution des règles encadrant les importations, transition vers les semences 100 % bio, définition de la notion de variétés biologiques) elles ont aussi exprimé leur désaccord auprès de leurs autorités de tutelle sur un certains nombre de points tels que l’introduit des dérogations au contrôle annuel auxquelles elles ne sont pas favorables ou encore le maintien jusqu’à 2031 pour quelques pays nordiques de certifier en bio des cultures hors sol. Ce régime dérogatoire, annoncé comme temporaire, n’est pas cohérent avec les principes de la production biologique selon le Synabio et les autres organisations professionnelles françaises de la bio.
Jean Verdier, président du Synabio, déclare à ce propos: « les entreprises françaises de la bio que nous représentons sont déterminées à construire une production biologique pionnière et exigeante. Nous prendrons d’ici 2021 les initiatives nécessaires pour mettre en oeuvre cette vision dans nos entreprises, avec l’ensemble de nos partenaires des filières bio. Depuis plus de trois ans, les professionnels français de la bio ont porté une vision commune du cahier des charges auprès des institutions européennes. Cette dynamique collective doit se poursuivre et il faut envisager ensemble la piste d’un logo AB avec un nouveau contenu. »
En attendant la mise en application du nouveau règlement qui entrera en vigueur dans trois ans les organisations professionnelles (Synabio, Synadis Bio, Fnab…) restent vigilantes quant à la rédaction des nombreux textes d’application qui viendront le compléter et le préciser, notamment en matière de contrôle.
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