Perspectives pour les oléagineux : des enjeux d’approvisionnement pour ces ingrédients tendances en bio

22 juin 2022

Ingrédients connus et reconnus pour leurs qualités nutritionnelles, les oléagineux sont utilisés dans de nombreux produits alimentaires, en particulier en bio. Les études de cohorte Nutrinet ont d’ailleurs montré que les consommateurs de produits bio avaient un régime plus riche en graines et fruits secs[1].

Fruits oléagineux (crédit photo : Unsplash)

Il est en effet nécessaire de distinguer ces plantes cultivées pour leurs graines ou leurs fruits riches en matières grasses, qualifiées d’oléagineux :

  • Les graines oléagineuses issues de plantes cultivées pour la production d’huile : graines de tournesol, de soja, de colza, de lin, etc.
  • Les fruits oléagineux : olive, noix, noisettes, amandes, etc.

Disponibles en direct pour le consommateur (brutes ou en purées entre autres), ce sont aussi des ingrédients sous multiples formes qui permettent aux transformateurs d’innover, notamment sur un marché qui se végétalise. Mais malgré les atouts innombrables de ces ingrédients, les filières doivent aujourd’hui affronter de nombreux enjeux d’approvisionnement.

Les oléagineux, des plantes aux multiples atouts nutritionnels

Nombreux sont les bienfaits nutritionnels liés à la consommation d’oléagineux bio.

Caractérisés par une forte densité énergétique, leur teneur en acides gras polyinsaturés, dont notamment les oméga 3, est particulièrement élevée. Ils jouent ainsi un rôle dans la prévention des maladies cardiovasculaires, et sont nécessaires au fonctionnement du cerveau, du système nerveux et de la rétine. C’est d’ailleurs pour cette richesse en oméga 3 que le PNNS[2] a intégré la consommation de fruits à coque non salés dans ses recommandations. 

Au-delà des matières grasses, les oléagineux sont également riches en fibres, en protéines végétales, en vitamines liposolubles et en minéraux (magnésium, calcium, fer et potassium notamment), dont l’apport est optimal si l’enveloppe des fruits oléagineux est conservée.

Ainsi, leurs atouts permettent la valorisation de nombreuses allégations nutritionnelles et de santé, notamment en lien avec la prévention de maladies cardiovasculaires[3]. Leur richesse en acides gras insaturés leur permet de bénéficier d’une allégation de santé en lien avec le « maintien d’une cholestérolémie normale », l’allégation de santé « Les noix contribuent à améliorer l’élasticité des vaisseaux sanguins » est également possible.

Pour en savoir plus sur les autres allégations associées aux oléagineux (cholestérolémie, lutte contre le stress oxydatif, réduction de la fatigue, etc) : les nombreuses opportunités de valorisation nutritionnelle des oléagineux

Une offre produits large pour des applications variées

Entier, en poudre, en purée, en huile… les oléagineux bio sont proposés sous des formes diverses et des degrés de transformation variés, et disposent ainsi d’une offre produits large

Outre les graines oléagineuses bio servant à la production d’huile, les oléagineux au sens large entrent dans la composition d’un grand nombre de références de produits transformés bio. Incontournables d’un point de vue nutritionnel, ils présentent aussi des atouts organoleptiques intéressants grâce notamment à leurs arômes et leur apport de texture.

Utilisées en substitution de certains corps gras (beurre, margarine…), les purées d’oléagineux se prêtent à de nombreuses applications salées comme sucrées. La purée d’amande remplace aisément le beurre dans des cakes, crumbles ou pâtes à tarte. La texture mucilagineuse de la purée de graine de lin est particulièrement intéressante pour lier des sauces.

Les oléagineux sont très présents sur le marché des alternatives végétales. Soja, amande, noix de cajou, noisette… : utilisés sous différentes formes (‘lait’, poudre, purée), ils constituent la base de bon nombre de boissons, fromages et desserts végétaux.

Le segment des spécialités fromagères végétales est particulièrement friand de la noix de cajou pour substituer le lait. Une étude du marché des fromages végétaux, menée par Ingrébio en 2021, a notamment mis en évidence que plus des ¾ des fromages végétaux fermentés analysés, étaient formulés à base de noix de cajou. Cette tendance s’explique par les qualités fonctionnelles de ces fruits à coque, recherchés pour leur capacité de fermentation ou leur apport d’onctuosité.

Paté Végétal
Ecolife Food

Le segment des tartinables salés est également particulièrement concerné par cet engouement. Selon une enquête menée par Ingrébio sur 190 produits apéritifs à tartiner (voir article : Étude de marché sur les tartinables apéritifs), plus de 55% étaient composés de fruits à coques et/ou de graines oléagineuses. Si certains fabricants misent sur l’originalité de la recette, comme le tartinable aux lentilles corail et amandes des Délices de L’Ogresse, d’autres s’en servent comme base principale pour une déclinaison végétale d’un pâté.

Le dynamisme des innovations des produits enrichis en protéines (marché du végétal, alimentation pour sportifs, etc.) contribue à l’émergence des matières protéiques végétales. Les farines oléagineuses se font une place importante sur ce marché, et les fournisseurs innovent aussi sur les formes proposées à l’instar des protéines de graines de courge toastées bio, ou des protéines de graines de tournesol texturées. Pour en savoir plus, le Cluster Bio Auvergne Rhône Alpes propose, en association avec Nutrifizz et Ingrébio, une étude sur l’intégration des protéines végétales dans les produits biologiques.

Graines de Tournesol Jean Hervé

Des filières d’approvisionnement en proie à de nombreux défis

On ne peut que le constater, les oléagineux bio profitent d’une renommée notable. Pour autant, l’approvisionnement biologique est complexe, notamment car la plupart de ces graines et noix sont importées. 

Une étude sur les Grandes Cultures Biologiques réalisée par Ecozept et And-I pour l’Agence Bio fin 2021 faisait ressortir que l’importation de graines oléagineuses en France, dont la principale espèce concernée est le soja, est considérable (voir article Ingrébio Grandes cultures biologiques : panorama de la production européenne). Et l’Ukraine fait partie des principaux pays fournisseurs de graines oléagineuses bio à destination de l’Union Européenne. La guerre n’a fait qu’aggraver un marché déjà tendu lié à la pandémie de Covid-19. Outre une hausse inévitable du prix des huiles végétales, la pénurie de matière première oblige les transformateurs à reconsidérer leur source d’approvisionnement, qui n’est pas sans conséquence pour le marché bio.

Concernant les fruits à coques oléagineux, la noix est le plus cultivé en France, en bio comme en conventionnel. La filière noix bio française a vu ses volumes augmenter ces dernières années, grâce à la conversion de nombreux agriculteurs. Pour répondre à une très forte demande en amandes et noisettes bio origine France, les filières sont en cours de développement, mais doivent faire face à de nombreux freins (pour plus d’informations, voir l’article sur les filières noix, amandes et noisettes biologiques françaises).

Mais certains fruits à coque d’origine plus lointaine comme la noix de cajou, rencontrent un vif succès dans les formulations. Mais la noix de cajou repose le plus souvent sur des filières complexes et un bilan carbone lourd. Certains transformateurs bio misent sur des filières plus responsables : c’est le cas de la marque Petit Veganne, qui utilise exclusivement de la noix de cajou bio provenant d’une filière vietnamienne labellisée Fair For Life ou de Forest Garden pour ses spécialités fromagères végétales fermentées bio.

L’engouement du marché français pour les oléagineux nous oblige à nous questionner sur l’avenir de ces filières, conditionnées par l’actualité morose et les freins techniques auxquels elles font face. Les enjeux de développements de filières pérennes représentent un défi considérable, qui s’avère nécessaire à considérer pour les années à venir.

Autrice : Flora NAUDIN LEPICIER, Chargée de mission, Ingrébio

[1] Baudry, J., Allès, B., Péneau, S., Touvier, M., Méjean, C., Hercberg, S., . . . Kesse-Guyot, E. (2017). Dietary intakes and diet quality according to levels of organic food consumption by French adults: Cross-sectional findings from the NutriNet-Santé Cohort Study. Public Health Nutrition, 20(4), 638-648. doi:10.1017/S1368980016002718

[2] Programme National Nutrition Santé

[3] Règlement (UE) 432/2012 de la Commission du 16 mai 2012 sur la liste des allégations de santé autorisées pour les denrées alimentaires.

Classés dans :


Articles récents dans la même catégorie

+

Inscrivez vous à notre newsletter

Vous acceptez de recevoir nos derniers articles par email
Vous affirmez avoir pris connaissance de notre Politique de confidentialité.